Quand Greg Rehman, pompier d’Edmonton, en Alberta, s’est fait diagnostiquer un cancer de la prostate à l’âge de 44 ans, le spécialiste qui a posé le diagnostic a dit qu’il s’agissait d’une « maladie de vieillard » et s’est dit étonné de voir qu’un homme de son âge n’ayant pas d’antécédents familiaux de cette maladie en soit atteint.
Même après que M. Rehman a eu indiqué qu’il était pompier et que cela accroissait le risque de cancer de la prostate qu’il courait, le médecin demeurait sceptique au sujet du lien.
M. Rehman, qui a maintenant 49 ans, a reçu un diagnostic précoce grâce au fait que le service d’incendie et de secours d’Edmonton avait adopté l’Initiative de l’AIP sur le bonne forme et le mieux-être (WFI), qui comprend des examens médicaux de référence sur bon nombre de maladies professionnelles, dont les cancers. Ce sont les tests de dépistage en question qui ont permis de détecter des taux élevés de l’antigène prostatique spécifique (APS) chez M. Rehman en avril 2018 après trois années de résultats normaux.
« Il ne se passait rien de particulier. Ma vie était normale. Mais l’examen médical annuel prévu par mon service et notre programme de WFI permet de commencer à dépister le cancer de la prostate avant l’âge de 50 ans. Cela m’a permis de faire surveiller mes niveaux d’APS . On m’a dit un jour que je frisais la limite et l’année suivante que je la dépassais et que je devais assurer un suivi avec mon médecin de famille », déclare M. Rehman, qui est pompier depuis 25 ans et qui préside actuellement la section locale 209 d’Edmonton.
Dans certains cas, comme celui de M. Rehman, un diagnostic de cancer de la prostate ne nécessite pas une intervention immédiate. Les médecins procèdent plutôt à ce qu’ils appellent un suivi actif, ce qui évite les interventions telles que la chirurgie tant que le cancer progresse lentement. M. Rehman a subi des biopsies et continuera de faire analyser périodiquement ses niveaux d’APS dans le cadre de la WFI afin de surveiller l’état de son cancer.
Il fait remarquer que la surveillance de l’évolution du cancer de la prostate au fil du temps permet d’éviter la chirurgie inutile et ses effets secondaires et donne le temps aux avancées des traitements médicaux d’entrer en jeu si le cancer atteint un stade où une intervention médicale est nécessaire.
Selon la Société canadienne du cancer, le cancer de la prostate est le plus courant chez les hommes, dont un sur huit s’en fait diagnostiquer un au cours de sa vie. Près de 100 % des hommes atteints de cancer de la prostate survivent au moins cinq années après que le diagnostic a été posé si le cancer est dépisté tôt. Cependant, seulement 3 hommes sur 10 survivent cinq ans si le diagnostic est tardif.
Des études ont confirmé que les pompiers courent un risque accru de cancer de la prostate. Il s’ensuit que presque toutes les provinces inscrivent cette maladie à leur liste des cancers présumés professionnels chez les pompiers afin de faciliter l’obtention d’indemnités pour accident ou maladie du travail. La demande de M. Rehman a été approuvée, et son indemnisation couvre actuellement les frais de son suivi médical, comme par exemple ses congés et son stationnement. Si une intervention médicale plus poussée s’impose plus tard, les frais en seront payés.
La couverture du cancer de M. Rehman par la CAT de l’Alberta en vertu de la loi assurant une couverture présomptive lui donne un peu plus de paix d’esprit. « Quand on livre déjà une lutte, la dernière chose qu’on veut, c’est de devoir lutter avec la CAT aussi. On veut savoir qu’on est couvert, que la CAT couvre nos arrières et qu’on peut se concentrer sur son rétablissement , », dit-il.
En réponse à ce qu’il a vécu, M. Rehman défend solidement le dépistage précoce du cancer chez les pompiers et pompières et encourage les services d’incendie à adopter la WFI de l’AIP, programme global pour la bonne forme du personnel des services d’incendie établi par l’AIP et l’Association internationale des chefs de service d’incendie.
« Je sais qu’il y a des cancers qu’on ne peut pas dépister assez tôt, mais si vous ne consulter pas votre médecin et surtout si vous ne participez pas à un programme comme la WFI, le dépistage précoce ne pourra pas vous sauver. C’est là l’avantage de notre programme de WFI et du dépistage précoce. Je n’aurais pas su que j’avais un cancer sans cela. Même six ans plus tard, je ne me sens toujours pas cancéreux. »
Rehman fait fond sur son expérience pour parler de l’importance du dépistage médical aux membres de sa section locale 209, et notamment du besoin de défendre sa propre cause devant un médecin qui ne comprend pas que les pompiers devraient faire l’objet d’un dépistage du cancer en plus bas âge que les autres. Les pompiers ont lutté d’arrache-pied pour obtenir des lois assurant une couverture présomptive et pour réduire l’exposition afin d’amenuiser les risques de cancer, mais ils n’ont pas mis l’accent sur le dépistage précoce, selon lui.
Rehman dit que le fait que le spécialiste n’ait pas compris son diagnostic à l’époque est un bon exemple des raisons pour lesquelles il faut sensibiliser davantage les médecins aux risques accrus que courent les pompiers et qu’il est heureux de voir le projet de loi C-224 reconnaître ce besoin. Adopté en juin 2023, ce projet de loi pose un cadre national de lutte contre le cancer professionnel chez les pompiers qui englobe l’évaluation des besoins en sensibilisation de la communauté médicale.